Fabien Mirabaud

La Panamerican Highway

...de Septembre 2002 à Mars 2003

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Le monde de la moto :

La Bolivie, Part 2 - Le Salar d Uyuni

Cette traversee du Salar d Uyuni et des montagnes boliviennes, ces 5 jours resteront parmi nos plus grands souvenirs, nos plus belles images, nos plus grandes aventures !

Jeudi 16 Janvier - Le Jour du Salar

Nous sommes tout exites ! Nous faisons nos dernieres courses, achetons 20 litres d essence et 20 litres d eau chacun. Nous passons confirmer notre rendez-vous avec la jeep qui nous ravitaillera, demain. Midi, tout est boucle, nous nous lancons ! A peine sorti du village d Uyuni, la route est de terre et de sable ; la "tole ondulee" nous secoue mechament. Nos premieres frayeurs, nous sentons l arriere de la moto chasser, nous ralentissons.
Apres trente kilometres, le reve commence ! Une etendue blanche a perte de vue. Au debut, nous suivons les traces, pour connaitre le cap a suivre. Nous croisons des travailleurs qui "cultivent" le sel, des petits tas parsement l entree du Salar. Malgre la forte chaleur, ils se couvrent integralement, des pieds a la tete, de gants et de cagoules, pour se proteger du soleil et de sa violente reverberation.
Puis les traces s estompent et nos derniers reperes disparaissent derriere nous. Nous sommes seuls au monde. Les plaques de sel craquent a notre passage. Nous jouons, comme des pilotes de chasse, a croiser nos trajectoires, a plus de 90 km/h. Aucun obstacle, aucune limite, l ivresse l emporte !
Nous nous dirigeons plein Est, l Hostel del Sal apparait, perdu au milieu de nulle part. Une batisse entierement faite de sel : ses briques, ses tables, ses chaises... Des ouvriers s affairent a la construction d une seconde petite maison de sel, ils sont eux-aussi integralement couverts !
Toujours plein Est. Au loin, a 60km, apparait a l horizon un point noir sur fond blanc, notre objectif, l'Isla de Pescadores. Nous continuons a jouer, sur nos motos, a vive allure.
Nous accostons notre ile et posons pied a terre. Quand deux motos debarquent a leur tour ! C est la Quatrieme Dimension, le temps se repete, nous sommes sortis de nos corps et nous nous voyons arriver ! Non...ils s approchent, ce sont deux neo-zelandais qui parcourent la Panamerican. C est vraiment sur cette ile deserte que l on s attendait a ce genre de rencontre !
Nous faisons le tour de notre ile et trouvons la plage ideale pour etablir notre campement de Robinson. De lautre cote, un gardien veille sur son ile, nous nous faisons discrets ! Nous montons nos tentes avec nos deux nouveaux comperes et ramassons quelques troncs de cactus morts pour le feu de ce soir. La moto se transforme en semi-remorque pour tracter un tronc trop lourd.
Le soleil se couche, nous foncons admirer le spectacle au sommet de l ile, au milieu des cactus. Nous nous sentons vraiment comme des naufrages.
La nuit tombee, le vent se leve, nous chauffons notre soupe sur le feu. Nous profitons du silence, de cette agreable solitude et nous nous couchons. Nous nous endormons doucement, avec une petite apprehension : serons-nous prisonnier sur notre ile, entourres par un salar inonde et ainsi infranchissable en moto ?...

Vendredi 17 janvier - Le jour le plus long

Seuls au monde, Cast Away !... Nous nous reveillons, nous pointons le nez hors de la tente, notre ile en est vraiment devenu une, nous sommes entourres d eau ! Vision extraordinaire a l horizon : il y en a pas ! Les nuages se fondent avec leur reflet, notre ile est en levitation dans cet univers...La pluie cesse, nous levons le camp. Nous faisons nos premiers pas sur cette mer, nous marchons sur les eaux, Alleluia !
Nous regagnons le poste de garde de l autre cote de l ile, nos deux neo-zelandais partent de leur cote. Le soleil apparait, la lumiere deviens tres intense avec la reverberation.
A partir de midi, les jeeps arrivent une a une, l ile est prise d assault, c est le debarquement ! Arrive notre guide, Lucas, avec notre eau et notre essence. Nous nous lancons et roulons sur le salar, ou plutot sur le lac. Nous avons l impression de voler, avec ce ciel qui se reflete dans l eau. Une enorme gerbe de flotte jaillit derriere nous, nous nous amusons a nous eclabousser ! Nous sommes comme des avions en formation, a jouer a croiser nos trajectoires.
Nous atteigons la rive, une sorte de ponton sert de repere. Trois petites tombes apparaissent a cote, ce sont celles de 3 enfants boliviens, perdus et morts de froid l an passe, la temperature atteind les -30 en hiver...
La nuit est tombee et la route est desormais tres difficile : l obscurite, la boue, la pluie, nous glissons sans arret, nous chutons a plusieurs reprise, sans gravite. Thomas glisse une fois : un vol plane, sa valise gauche est arrachee. Fabien tombe violemment : une cote felee.
Il est 23 heures, nous avons roule 4 heures dans le noir sur une patinoire de boue, nous sommes trempes jusqu aux os. Nous arrivons a San Juan, dans un petit gite. Nous nous changeons rapidement, nous nous rechauffons en avalant un the brulant et nous nous glissons sous les couvertures, morts de fatigue...

Samedi 18 Janvier - La tempete de neige a 4.500 m

Nous nous levons de bonne heure, 7h, nous avons beaucoup de route. Nous avons deja bien froid mais le soleil nous rechauffe un peu. Un premiere chute de Thomas dans une marre, seul le guidon sort de l eau, le moteur ne redemarre pas, c est le filtre a air, ilk est rempli d eau. Nous le changeons rapidement et nous repartons. Nous conduisons de jour, mais notre progression reste laborieuse aujourd hui. Cette fois nous traversons de veritables lacs de boue. Meme pied a terre, nous glissons. Nous ne comptons meme plus les chutes. Notre record de vitesse aujourd hui est de 40 km/h.
Nous nous efforcons de rattraper les jeeps, qui, des que nous les rejoignons apres leur pauses, repartent aussitot. Nous cassons la croute au creux de quelques rochers, dans un paysage plutot lunaire. Plus tard, le chemin finit par disparaitre, nous traversons des grands champs, des grandes etendues, de terre et de cailloux, sans trace ni repere, seulement loin devant les jeeps qui s enfuient.
Le pire reste a venir, nous sommes a 4.500m, une tempete de neige nous tombe dessus ! Nous sommes completement congeles, les doigts bleus, des plaques de glace recouvrent notre visiere, les flocons nous piquent les yeux, nous ne voyons plus rien, et pas plus les tranchees menacantes de sable !
Puis le temps se calme, l Arbol de Piedra apparait, une pierre etrange au milieu de nulle part. Nous continuons notre chemin, nous croisons des lacs colores et leurs paisibles famands roses. C est surement extraordinaire, mais transis par le froid, nous avons du mal a realiser notre chance ! Nous roulons jusqu a 20 heures le soir, 12 heures de moto-cross, sans arret. Nous nous ecroulons, morts de froid et de fatigue.

Dimanche 19 Jamvier - Les geysers a 5.000 m

Reveil a 4h du mat' pour profiter du lever du soleil, on est deja creves ! Sous nos couvertures, le froid fait de notre souffle une fumee blanche. Nous nous calons sur nos motos et partons dans le noir.
Apres une petite heure, les doigts geles, le soleil se leve sur les vocans. Rose, bleu, vert, les lumieres eclatent ! Nous arrivons aux geysers. Le GPS nous indique 5.013 m, record battu ! Les quelques rayons du soleil commencent a peine a nous rechauffer. De la terre, sortent ses puissants souffles. Serions-nous en train de rouler sur la lune ?...
Puis nous rejoignons les sources chaudes. Nous faisons trempette, nous sommes un peu moins bleus. Encore quelques km, et apparait la Laguna Verde. Le vent se leve progressivement, le lac devient d une couleur turquoise tres vive.
Notre guide nous rend nos valises, nous faisons nos adieux a Victoria, notre mere adoptive qui nous rechauffait les mains tqnt qu elle pouvait. Et nous voila seuls, au bord du lac. Le vent souffle violemment maintenant et manque de peu d emporter nos vetements.
Nous rejoignons les ruines d un ancien refuge. Nous montons la tente entre quatre murs, mais elle ne demande qu a s envoler. Il fait encore jour, mais nous nous endormons rapidement, epuises. Au fond de nos duvets, nous sentons deja le froid qui revient a l attaque.

Lundi 20 Janvier - La fin

Le froid, toujours le froid. Nous levons le camp. Une dizine de kilometres, la Laguna Verde disparait, nous arrivons ala frontiere.
Adieu Bolivie ! Tes chemins si terribles mais tes montagnes tellement extraordinaires !...